Situation générale
L’épidémie de SARS-CoV-2 est actuellement causée presque exclusivement par le variant Delta (B.1.617.2), qui a supplanté les variants qui circulaient auparavant. Le nombre de cas et d’hospitalisations a augmenté entre la fin du mois de juin et la mi-août pour ensuite se stabiliser à un niveau élevé pendant un mois, avant de diminuer à nouveau depuis début septembre 2021. On s’attend à ce que la circulation réaugmente en raison d’effets saisonniers, ce qui pourrait conduire à une valeur R supérieure à 1. Une augmentation rapide des chiffres mettrait fortement en difficulté le système de santé, qui est toujours sous forte pression.
Dynamique
Depuis le début du mois de septembre 2021, l’épidémie de SARS-CoV-2 est en recul. La moyenne sur 7 jours du nombre de reproduction dans l’ensemble du pays est de 0,89 (intervalle d’incertitude de 95 %, IC : 0,75-1,02), ce chiffre reflétant le niveau de circulation du virus enregistré dans la semaine du 25.09. au 01.10.2021[1].
Les estimations sur une base journalière du taux de reproduction effectif Re pour l’ensemble de la Suisse sont de :
- 0,89 (95 % IC : 0,73-1,06) sur la base des cas confirmés (au 01.10.2021).
- 0,71 (IC 95 % : 0,53-0,92) sur la base des hospitalisations (au 25.09.2021). Pour une comparaison sur la base des cas confirmés, le Re est estimé à 0,86 (IC 95%: 0,77-0,95) pour le même jour.
- 0,59 (IC 95% : 0,24-1,09) sur la base des décès (au 19.09.2021). Pour une comparaison sur la base des hospitalisations, le Re est estimé à 0,75 (IC 95 % : 0,59-0,92) pour le même jour. Sur la base des cas confirmés, le Re est estimé à 0,89 (95% IC: 0,62-1,17) pour le même jour.
Les estimations pourraient être rectifiées en raison des décalages temporels des notifications et des fluctuations dans les données. Nous soulignons que les valeurs Re reflètent le niveau de circulation du virus avec un décalage, car un certain laps de temps s’écoule entre l’infection et le résultat du test ou, éventuellement, le décès. Pour les valeurs Re basées sur le nombre de cas, ce délai est d’au moins 10 jours, et jusqu’à 23 jours pour les décès.
En parallèle, nous déterminons les taux de variation des cas confirmés, des hospitalisations et des décès au cours des 14 derniers jours[2]. Le nombre des cas confirmés a reculé de -21% (IC : -10% à -31%) par semaine, le nombre d’hospitalisations de -28% (IC : -5% à -46%) et le nombre de décès de -44% (IC : -15% à -64%). Ces valeurs reflètent l’incidence de l’infection survenue il y a plusieurs semaines.
Notre dashboard permet de suivre la variation des chiffres pour le nombre de cas, d’hospitalisations et de décès, stratifiés par âge [3]. Le nombre de cas diminue de manière significative dans tous les groupes d’âge, à l’exception des tranches 20-30 ans, 70-80 ans et plus de 80 ans. Les hospitalisations ont sensiblement diminué au cours des 14 derniers jours enregistrés. Cette tendance n’est significative pour aucun des groupes d’âge s’ils sont considérés séparément.
Chiffres absolus
Le nombre cumulé de cas confirmés au cours des 14 derniers jours est de 167 pour 100 000 habitants. La positivité est de 2,3 % (au 08.10.2021, soit le dernier jour pour lequel seules quelques notifications tardives sont attendues).
Le nombre de personnes atteintes de COVID-19 et hospitalisées dans les unités de soins intensifs s’est situé, au cours des 14 derniers jours, entre 154 et 203[4] (la variation était de -13% (IC : -7% à -18%) par semaine).
Le nombre de décès confirmés en laboratoire au cours des 14 derniers jours s’est situé entre 1 et 9 par jour[5].
Variants du SARS-CoV-2
Depuis la semaine 26, Delta (B.1.617) est le variant viral dominant en Suisse. Cette variante, décrite à l’origine en Inde, avait une fréquence de 1% au cours de la semaine 19, de 24% au cours de la semaine 24 et une fréquence de 99,9% au cours de la semaine 38 parmi les cas séquencés [6]. À partir de cette augmentation de la fréquence du variant Delta, on peut calculer un avantage de transmission de 58% (IC 95 % 56-60% par rapport au variant Alpha, ce qui correspond aux estimations de l’avantage de transmission de 56 % (IC 95 % : 34 %-81 %) en Angleterre[7]. En raison de cet avantage de transmission, le variant Delta est désormais dominant dans de nombreuses régions du monde.
La variante Delta cause des évolutions plus sévères de la maladie que les souches précédemment dominantes en Suisse. Dans une vaste étude menée en Angleterre, les patients atteints par la variante Delta présentaient un risque d’hospitalisation plus de deux fois supérieur à celui des patients atteints par la variante Alpha[8]. Une augmentation similaire du risque a été observée en Écosse[9] et au Canada[10].
Variant Delta et efficacité des vaccins
Infection : On constate une convergence des preuves vers une efficacité réduite des vaccins à ARNm contre les infections au variant Delta du SARS-CoV-2, y compris les infections asymptomatiques. Le vaccin de Pfizer/BioNtech a une efficacité de 39 % (IC 95 % : 9-59 %) selon les données fournies par Israël[11] ; et de 79 % (IC 95 % : 75-82 %) selon les données récoltées en Écosse[12]. Un rapport de l’étude REACT a calculé que l’efficacité du vaccin contre l’infection était de 49 % (IC 95 % : 22-67 %) [13] (ce rapport n’opérant pas de distinction entre les vaccins utilisés en Angleterre). En résumé, on estime que les vaccins à ARNm permettent de réduire de moitié le risque de contracter la variante Delta du virus.
Infection symptomatique : La protection vaccinale contre les infections symptomatiques par le variant Delta est réduite par rapport aux infections par Alpha. Selon un rapport de Public Health England[14], l’efficacité est passée de 89 % (IC 95 % : 87-90 %) contre le variant Alpha, à 79 % (IC 95 % : 78-80 %) contre la variante Delta (voir également[15],[16] ; Pfizer/BioNtech). D’après les données canadiennes, l’efficacité contre les infections symptomatiques par la variante Delta est de 85 % (IC 95 % : 78-89 %)[17] (Pfizer/BioNtech et Moderna). Une nouvelle étude réalisée en Californie ([18]) estime que l’efficacité du vaccin Moderna contre l’infection par le virus Delta est de 87 % (IC 95 % : 84-89 %) et de 98 % (IC 95 %: 97-99 %) contre l’infection par le virus Alpha. Selon cette étude, l’efficacité contre le variant Delta est tombée à 80% (IC 95%: 70-87%) après cinq mois. Des études menées en Israël[19] estiment l’efficacité à 40 % seulement (IC 95 % : 9-61 %). Plusieurs facteurs pourraient expliquer la faible efficacité de la vaccination contre le variant Delta en Israël : il s’y est écoulé davantage de temps depuis la vaccination que dans les autres pays, les deux doses de vaccin ont été administrées avec un intervalle de temps minimal (3 semaines) et seul le vaccin Pfizer/BioNtech a été administré, qui semble être légèrement moins efficace que le vaccin Moderna.
Évolution grave de la maladie / hospitalisation : La protection vaccinale contre une évolution grave de la maladie demeure élevée également pour le variant Delta. L’efficacité est d’environ 96% (IC 95 %: 91-98 %) selon les données récoltées en Grande-Bretagne[20],[21], et de 88 % (IC 95 %: 78,9-93,2 %) selon les données concernant Israël [22]. Ces estimations se réfèrent à la protection dont bénéficient les vaccinés par rapport aux non-vaccinés et ne sont pas ventilées en fonction des différents vaccins utilisés dans ces pays. Selon une nouvelle prépublication[23] basée sur des données provenant de Californie, le vaccin de Moderna offre une protection de 98% (IC 95%: 93-99%) contre l’hospitalisation suite à une infection par la variante Delta. Selon une prépublication parue en Israël[24] et les analyses effectuées par Public Health England[25], la protection contre les évolutions graves de l’infection semble diminuer avec le temps. Dans l’ensemble, toutefois, environ 9 hospitalisations sur 10 peuvent être évitées par une vaccination complète.
Transmission : La vaccination prévient la propagation du virus par au moins deux mécanismes : premièrement, en réduisant les infections, tant symptomatiques qu’asymptomatiques, et donc le nombre de personnes infectées (voir ci-dessus); et deuxièmement, en réduisant la propagation par les personnes infectées malgré la vaccination. En effet, même lorsqu’elle est infectée, une personne vaccinée est moins susceptible de transmettre le virus qu’une personne non vaccinée. Une nouvelle prépublication[26] fait état d’une étude selon laquelle le risque de transmission d’une infection post-vaccinale par la variante Delta est environ 2/3 plus faible après deux injections du vaccin ARNm de Pfizer/BioNtech que chez les personnes non vaccinées. Les raisons exactes de cette protection ne sont pas connues, mais elle pourrait s’expliquer par le fait que la phase infectieuse est plus brève[27] ou que le virus est moins infectieux chez les personnes vaccinées[28] .
Liens:
[1] https://sciencetaskforce.ch/fr/taux-de-reproduction/ et https://ibz-shiny.ethz.ch/covid-19-re-international/ : Les estimations de Re au cours des derniers jours peuvent être sujettes à de légères fluctuations, lesquelles se produisent en particulier dans les petites régions, lors de changements survenant dans la dynamique, ou lorsque le nombre de cas est faible.
[2] https://ibz-shiny.ethz.ch/covidDashboard/trends : Les nombres de cas confirmés et d’hospitalisations/décès des 3 et 5 derniers jours respectivement ne sont pas pris en compte en raison des décalages temporels de notification.
[3] https://ibz-shiny.ethz.ch/covidDashboard/ , dashboard Time Series
[5] https://www.covid19.admin.ch
[6] https://cov-spectrum.ethz.ch/
[7] https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/993358/s1288_Warwick_RoadMap_Step_4.pdf
[8] https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(21)00475-8/fulltext
[9] https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)01358-1/fulltext
[10]https://doi.org/10.1101/2021.07.05.21260050
[11] https://www.gov.il/BlobFolder/reports/vaccine-efficacy-safety-follow-up-committee/he/files_publications_corona_two-dose-vaccination-data.pdf
[12] https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)01358-1/fulltext
[13] https://spiral.imperial.ac.uk/bitstream/10044/1/90800/2/react1_r13_final_preprint_final.pdf
[14] https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/1010472/Vaccine_surveillance_report_-_week_32.pdf
[15] https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa2108891
[16] https://doi.org/10.1101/2021.07.05.21260050
[17] https://www.alberta.ca/stats/covid-19-alberta-statistics.htm#vaccine-outcomes
[18] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.09.29.21264199v1.full.pdf
[19] https://www.gov.il/BlobFolder/reports/vaccine-efficacy-safety-follow-up-committee/he/files_publications_corona_two-dose-vaccination-data.pdf
[20] https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/1010472/Vaccine_surveillance_report_-_week_32.pdf
[21] https://khub.net/web/phe-national/public-library/-/document_library/v2WsRK3ZlEig/view_file/479607329?_com_liferay_document_library_web_portlet_DLPortlet_INSTANCE_v2WsRK3ZlEig_redirect=https%3A%2F%2Fkhub.net%3A443%2Fweb%2Fphe-national%2Fpublic-library%2F-%2Fdocument_library%2Fv2WsRK3ZlEig%2Fview%2F479607266
[22] https://www.gov.il/BlobFolder/reports/vaccine-efficacy-safety-follow-up-committee/he/files_publications_corona_two-dose-vaccination-data.pdf
[23] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.09.29.21264199v1.full.pdf
[24] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.08.24.21262423v1
[25] https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/1017309/S1362_PHE_duration_of_protection_of_COVID-19_vaccines_against_clinical_disease.pdf
[26] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.09.28.21264260v1.full.pdf
[27] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.07.28.21261295v1.full.pdf
[28] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.08.20.21262158v1